Note d'intention


William Blake : « Si les portes de la perception étaient nettoyées, chaque chose apparaîtrait à l'homme telle qu'elle est, infinie »

« A quoi la musique fait appel en nous, il est difficile de le savoir ; ce qui est certain, c'est qu'elle touche une zone si profonde que la folie elle-même n'y saurait pénétrer. »
Emile Cioran

La contemplation (theôria en grec est un déverbal de theôrô: je regarde, je contemple) est une application de l'esprit à voir et observer certaines réalités. Le terme a un sens particulier dans la religion et dans l'art. L'état contemplatif offrant dans le premier cas à l'âme une proximité avec Dieu et dans le second avec la nature.
« Trois opérations : Voir, opération de l'œil. Observer, opération de l'esprit. Contempler, opération de l'âme. Quiconque arrive à cette troisième opération entre dans le domaine de l'art. Emile Bernard, Propos sur l'art »
L'équivalent de la notion de contemplation dans le Yoga serait le samâdhi. Le samâdhi est la contemplation profonde. Mircea Eliade traduit par "enstase", pour opposer à l'extase, où l'âme sort, va à extérieur. Le mot samâdhi, dans le Râja-Yoga, celui des Yoga Sūtra de Patañjali (iie siècle av. J.-C. ?) signifie : état d'union avec le Dieu personnel ou d'absorption dans l'Absolu. Le samâdhi est le huitième, l'ultime des "huit membres" (ashtânga-yoga) du yoga classique (Kriyâ-Yoga, Râja-Yoga, Hatha-Yoga).
http://fr.wikipedia.org/wiki/Contemplation


L’attention juste ou pleine conscience consiste à ramener son attention sur l'instant présent et à examiner les sensations qui se présentent à l'esprit, comment elles apparaissent, comment elles durent quelque temps, et comment elles disparaissent. Cette pratique permet de se rendre compte de façon directe si une sensation est quelquefois permanente ou bien toujours impermanente. Par la suite, le pratiquant va aussi examiner la matière, les perceptions, les habitudes mentales positives ou négatives, la conscience, comment toutes les choses apparaissent, comment elles durent et comment elles disparaissent. L'observateur reste neutre et silencieux (le "silence mental") en examinant l'apparition et la disparition des sensations agréables, neutres ou désagréables, sans juger, sans chercher à retenir la sensation agréable ou à rejeter la sensation désagréable. L'observateur fait l'apprentissage du détachement et il se libère progressivement de la matière, de la sensation, de la perception, des conditionnements mentaux, de la conscience, et donc de duḥkha.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Pleine_conscience

Tolle considère son livre 'Le pouvoir du moment présent' comme la « reformulation actualisée d’un enseignement spirituel intemporel, l’essence de toutes les religions ». Il écrit que les religions ont été tellement recouvertes de sujets étrangers à leur nature que leur substance spirituelle est devenue presque complètement obscurcie, qu’elles sont devenues «dans une grande mesure… sujet de division plutôt que d’union des forces» et qu’elles sont devenues «elles-mêmes une part de la folie».
Tolle écrit que «la chose la plus importante qui puisse arriver à un être humain est le processus de séparation entre la pensée et la conscience» et que la conscience est «l’espace dans lequel les pensées existent» et que «la première cause de malheur n’est jamais la situation mais vos pensées à son sujet».
http://fr.wikipedia.org/wiki/Eckhart_Tolle


Qu'est-ce que Samyoga
Yoga Sutra 2,17 dit " drastrdrsyayogo samyogo heyahetu "ce qui signifie que« la cause de la souffrance est l'incapacité de distinguer entre celui qui perçoit et la Perception. Samyoga signifie généralement «très bien ensemble». Quels sont ceux qui sont "très bien ensemble" ici? Les deux qui sont reliés sont très bien qui perçoit (voyant) et la Perception (Vu).
Qui (quoi) est Perceveur
Yoga Sutra appelle le Perceveur " drstr "(prononcé comme drastra), qui signifie« celui qui voit ». Selon la pensée indienne ancienne, tous ceux qui sont sensibles avoir une partie qui perçoit et est consciente et a donc appelé en anglais «conscience». Il est aussi appelé "auto" "Esprit", etc En sanskrit, ce qui perçoit est appelé par des mots tels que Purusa ce qui signifie que ce qui réside à l'intérieur d'une ville (ici, c'est notre corps), Cit (consciemment) Atma (maître) , etc Ce concept, qui se transmet de Védas donne certaines caractéristiques particulières à la Perceveur:
  • Le percepteur est éternel dans la nature. Autrement dit, il ne naît ni ne meurt. Il est connu comme " sam. "
  • Le percepteur ne subit aucun changement. Par conséquent, il est appelé "Aparinami "
  • Le percepteur n'est rien d'autre que la conscience. Il est donc également connue sous le nom " Cité "
  • Le percepteur est de par sa nature, toujours dans un état ​​de béatitude. Cet aspect est appelée " Ananda "
Ce qui perçoit les besoins instruments de perception de percevoir et d'interagir avec cet univers. Les instruments de la perception sont l'esprit et les sens. Ensemble, ils forment une équipe dans l'acte de perception. Ce travail d'équipe est Samyoga.Comment cela peut-il être une cause de souffrance? Essayons de comprendre la nature des instruments de perception.
http://chennaionline.com/Columns/Yoga/The-Great-Gift-from-India---Part-III/20094311124329.col


Drastr-drsyoparaktam cittam sarvartham.
Drastr = le voyant, connaisseur, sous réserve; Drsya = vu, connu, objet; Uparaktam = couleur; cittam = esprit; Sarvartham = tous ensemble, tout appréhender, tout compris.
L' esprit coloré par l'Omniscient (le Purusa , la Conscience) et le connu (objet) est tout appréhender.
«L'esprit est coloré par l'Omniscient." Le sens de cette phrase (comme expliqué dans sutra précédent) est tout simplement ceci: l'esprit, un instrument de la perception, est éclairée par la lumière de la conscience.«L'esprit est colorée par du connu». Signification de cette phrase est la suivante: quand un «objet» (pas nécessairement un objet brut) est dans le domaine de la perception de l'esprit, il induit vrttis dans l'esprit (les degrés de l'esprit se colorée avec l'objet varier). De cette façon, le mental est affecté de deux façons.
«Esprit» est tout appréhender, signifie: la perception peut être à différents niveaux. C'est peut-être la perception d'un objet brut ou un sentiment (encore que ce soit: grossier et subtil). Il ya des couches et des couches de la perception, plus subtils d'entre eux étant tout simplement la notion de «je». Quand même cela est transcendé puis Purusa est établi dans son Svarupa, le pur état de conscience.

Cet article paraît dans le magazine Yoga , le Yoga Sudha Septembre, édition 2003. Cet article a été publié avec la permission www.yogasudha.com

Témoin, drastr, et "Ce qui est perçu", drsya

Dans le sûtra II. 17, on trouve à nouveau la trace évidente de l'influence du Sâmkhya. En effet, Patanjali expose dans ce sûtra, que la cause de la souffrance est la confusion entre le Principe de conscience, le Témoin et "ce qui est perçu". On retrouve donc ici la même chose que dans le Sâmkhya avec l'idée que l'ignorance provient du fait de la confusion entre Purusha (principe de conscience) et Prakrti(le monde manifesté).
Le manque de discernement, de recul, fait que le principe de conscience est confondu avec ce qui est perçu. C'est un peu comme si on confondait l'image avec son reflet dans un miroir. On a ici un véritable thème récurrent : la souffrance, l'ignorance, viennent du fait qu'on confond le principe de conscience, le permanent, avec "ce qui est perçu", l'impermanent. Ce manque de lucidité provoque la souffrance en créant dans les couches les plus subtiles de notre être, les germes des afflictions.

Dans le sûtra II. 18, Patanjali explique "ce qui est perçu" :  " "Ce qui est perçu" a comme caractéristiques la clarté, le mouvement et la stabilité ; il est composé des cinq principes de la matière et des (dix) fonctions sensorielles ; il vise un double but : l'expérience sensorielle et la libération." (traduction de Bernard Bouanchaud)Patanjali reprend ici les mêmes concepts que le Sâmkhya mais en utilisant des termes différents. Ce qu'il faut retenir, c'est que les instruments de perception et la matière, servent à l'expérience sensorielle et qu'il est possible de s'en libérer. On trouve ici ce qui a été déjà exposé par le Sâmkhya au sujet de la relation entre Purusha et Prakrti.
Le Témoin, le principe de conscience, est quant à lui en dehors de la matière, de "ce qui est perçu", et reste toujours pur. Il expérimente à travers le psychisme mais sans être altéré. Il est lié au manifesté, mais en même temps n'en fait pas partie. C'est un peu comme un miroir qui permet de voir et son essence ne se modifie pas au contact des images.
La Nature, "ce qui est perçu", sert le Témoin dans sa quête d'émancipation. Le propre de "ce qui est perçu" est d'être l'objet du Témoin, du principe de conscience. Mais lorsque le principe de conscience est délivré, "ce qui est perçu" n'existe plus pour lui, mais continue d'exister néanmoins pour les autres. En d'autres termes, bien que l'observateur, le Témoin, ne soit plus troublé par le jeu du monde manifesté, celui-ci continue à voiler la vision des êtres qui ne sont pas encore libérés. De plus, l'être libéré continue d'exister en ce monde, mais sans être troublé par celui-ci.

Ignorance et libération

L'ignorance provient de l'union entre le principe de conscience et "ce qui est perçu", la confusion entre les deux. Bien que cette union soit la cause de l'ignorance, elle sert à atteindre la liberté. En fait, la vie, le monde manifesté, sont des moyens, des occasions pour le principe de conscience d'atteindre plus de discernement et de lucidité. En d'autres termes, sans miroir il est difficile de voir son propre visage. Mais, si on ne garde pas de recul, on risque d'être subjugé par l'image et donc ne plus faire la différence entre le miroir et l'image reflétée. C'est un peu comme Narcisse qui se noie dans son propre reflet. D'où l'importance de faire preuve d'un grand discernement. (II. 26)
En appliquant une attention vigilante, le recul, le discernement, il est possible alors de briser l'union entre le principe de conscience et "ce qui est perçu". Alors apparaît la libération, kaivalya.
Dans le sûtra II.27, Patanjali explique que l'application de la sagesse discriminative comprend sept étapes, mais sans préciser leurs natures. Ainsi, selon les commentateurs, la description des sept étapes varie. Ce qu'il faut retenir ici, c'est que le Yoga, selon Patanjali, est un processus évolutif, graduel. Le pratiquant est dans une logique de transformation.
Les huit membres du Yoga

Patanjali explique que par l'application soutenue et persévérante des huit membres du Yoga, il est possible d'atteindre le discernement. Voici les huit membres :
yama, les principes relationnels
nyama, les principes personnels
âsana, la pratique des postures
prânâyâma, la pratique du contrôle du souffle
pratyâhâra, le retrait des sens
dhâranâ, la concentration
dhyâna, la méditation
samâdhi

Bien que les membres sont présentés du plus grossier au plus subtil, ils ne constituent pas un ensemble d'étapes chronologiques. Par contre, l'application de l'ensemble des différents membres constitue le Yoga de Patanjali.

Isvara pranidhâna a été déjà abordé dans le premier chapitre. Isvara se rapporte à la Réalité et certans le traduisent par Dieu. C'est placer sa confiance dans ce qui est réellement permanent. Dans le sûtra II.45, Patanjali explique queîsvara pranidhâna permet d'atteindre les pouvoirs du samâdhi. En plaçant sa confiance en soi et en la Réalité permanente, il est alors possible de se détacher de notre fonctionnement mental pour atteindre le samâdhi. C'est une façon aussi de dire que le samâdhi ne s'atteint pas par un acte de volonté, mais est un état qui apparaît de lui-même. C'est un peu comme lorsqu'on fait pousser une plante. On peut lui donner tous les soins nécessaires pour favoriser sa pousse, mais sa croissance ne dépend pas de nous. On peut donc juste favoriser l'émergence du samâdhi et faire confiance en notre être intérieur.

Pratyâhâra, le retrait des sens

Lorsque l'esprit est prêt aux concentrations grâce à la pratique du contrôle du souffle, survient le retrait des sens, la maîtrise sensorielle, pratyâhâra. C'est la capacité de ne plus être influencé parles sollicitations extérieures (à travers les sens) et intérieures (les pensées, émotions, etc.). L'esprit ne subit plus les fonctions sensorielles. Il peut choisir librement d'y répondre ou pas. Le pratiquant ne réagit plus forcément aux sollicitations extérieures. Il se libère du conditionnement. Ainsi, la vue d'une belle pâtisserie n'engendre plus automatiquement l'envie de la manger. Le pratiquant ne ressent plus le besoin systématiquement de s'occuper l'esprit par des sollicitations extérieures, comme la télévision par exemple.
Mais tout ceci n'est pas le résultat d'un refoulement, mais l'établissement d'un équilibre de l'esprit, d'une transformation profonde. L'esprit n'est plus l'esclave des sens. La vision n'est plus perturbée par les sollicitations de tout ordre. Les fonctions sensorielles sont maîtrisées et l'esprit libéré de leurs influences.
Bien que Patanjali énumère huit membres du Yoga dans le deuxième chapitre, il en explique que les cinq premiers dans ce même chapitre. Les trois derniers membres (dhâranâ, dhyâna et samâdhi) sont abordés dès les premiers sûtras du troisième chapitre.

Purusha

Au-delà de Prakriti, du manifesté et du non-manifesté, il y a le Principe qui est ni créateur, ni créé, c'est le Purusha"Le Purusha n'est ni producteur ni produit" (S-K, 3).Il est en-dehors de la matière et de l'activité psychique.
Le Purusha, littéralement "l'Homme" désigne l'essence ultime de l'homme, le Soi. Il est la Pure conscience, la Conscience-Témoin (sâkshin) qui observe immobile et en silence PrakritiPurusha est "madhyastha" (qui se tient au centre), équanime, impartial, impassible. Dans la strophe 56 du Sâmkhya-kârikâ, on trouve le terme pratipurusha qui signifie tous les Purusha. Le Sâmkhya considère donc qu'il y a une multiplicité dePurusha.
"Telle est l'activité de la Prakriti, la manifestation cosmique qui va du Grand Principe jusqu'aux éléments grossiers particuliers. Elle existe en vue de la libération de tous les Purusha.(pratipurusha) Bien qu'elle semble pour elle-même, elle est pour autrui."(S-K. 56)
"En vue de la libération de tous les Purusha" (pratipurusha)
 signifie que tous les êtres sont destinés à être libérés.
Au sujet du Purusha, le Sâmkhya-Kârikâ (17,18,19) dit :
"Le Purusha existe parce que :

- les agrégats sont orientés vers autre chose qu'eux-mêmes;
- l'inverse des trois attributs, etc, est réel
- quelqu'un doit contrôler,
- et expérimenter;
- et en raison d'une tendance vers l'isolement-libérateur. (kaivalyam)
  
En raison:

- de la non-détermination des naissances, des morts et des actions,
- et du fait que leur production n'est pas simultanée,
- et aussi, en vérité, par la manifestation contradictoire des trois attributs, la multiplicité du Purusha est établie.
  
Et par cette inversion est établie la nature de témoin de Purusha. Elle consiste en isolément-libérateur, neutralité, faculté de percpetion et non-action."
Purusha est dépourvu de qualités (nirgunatvat), sans désirs, car ceux-ci sont impermanents et donc ne peuvent appartenir à Purusha qui est libre éternellement. Les états de conscience lui sont étrangers. Purusha est et il connait. Il est comme l'âtmandes Upanishads, inexprimable. Purusha signifie aussi puri-shaya, "qui repose dans la citadelle". Les Vedas le situent dans la caverne du coeur.

Relation entre Purusha et Prakriti

Les raisons qui font qu'à un moment Purusha a été lié à Prakriti, sont inconnues. Le Sâmkhya ne s'intéresse d'ailleurs pas beaucoup à cette question, car il est plus important de chercher la libération que de comprendre quelque chose qui de tout façon n'est pas de notre domaine de compétence. La Prakriti se met en mouvement pour permettre au Purusha de se libérer.
" De même l'activité du lait, qui est inconscient, est la cause de la croissance du veau, de même l'activité de la Matière est la cause de la libération du Purusha.
De même que les gens s'engagent dans des activités pour mettre un terme à leur désir, de même le Non-Manifesté agit pour libérer le Purusha." (S-K., 57,58)
Le lien entre Purusha et Prakriti, permet à Purusha de percevoir et malgré qu'il est non-agissant, d'agir à travers le corps subtil. Les strophes suivantes parlent d'elles-mêmes :
"A partir de cette union, le corps subtil inconscient devient pour ainsi dire conscient ; et donc le Purusha, bien que non-agissant, devient donc pour ainsi dire agissant dans l'activité des attributs.
L'union du Purusha et de Pradhâna a pour but la perception ainsi que l'isolement-libérateur ; leur union est comparable à celle d'un boiteux et d'un aveugle. Elle produit la création." (S-K., 20-21)
Malgré son immobilité, Purusha met en mouvement Prakriti. Lorsque celle-ci, au début d'un cycle, est dans un équilibre parfait entre les différents guna, c'est Purusha qui met en branle la création et provoque la manifestation. Il est comme le moteur immobile d'Aristote. Un peu comme un aimant qui met en mouvement des particules de fer.

Karman et Samsâra

Le terme Karman désigne l'ensemble des activités physiques et mentales, comme la pensée, la parole, les émotions et les actes. Le Karman crée le caractère de l'individu par le biais des impressions recueillies au cours des différentes expériences vécues créant un réservoir de potentialités. Celles-ci deviennent des tendances (samskara) et demanderont à s'exprimer tôt ou tard, dans cette vie ou une autre. Avyakta, le non manifesté, est la somme des potentialités qui vont se manifester.
Chaque activité physique et mentale crée une expérience et chaque expérience crée le germe futur d'actions. Tout acte est soit la consommation d'un potentiel créé par un acte antérieur, soit la projection d'un nouveau potentiel qui demande à s'exprimer. C'est donc un cycle ininterrompu d'actes et de conséquences, c'est le Samsâra, la roue de l'existence, le cycle des vies et des morts qui se perpétue par le biais de la transmigration. Ce mouvement continuel nous maintient dans l'ignorance du Soi.
Purusha, le Soi, étant par essence éternel et immobile, ne fait pas l'objet d'une modification de lieu et de temps et donc ne transmigre pas. C'est le corps subtil qui transmigre : "Ainsi personne (aucun Purusha) n'est lié, ni libéré, ni ne transmigre : c'est la Matière (Prakriti) qui, ayant différentes fonctions, transmigre, est liée et libérée." (S-K. 62)
C'est par le biais du corps subtil que le karman et les tendances (samskara)transmigrent. En fonction de la vie menée, la proportion des guna varie et celle-ci déterminera la répartition des guna dans la vie future.

Tattva, les 25 principes

Le Sâmkhya donne en détail l'évolution de Pradhâna, le Préétabli, du plus subtil au plus grossier, et la répartition des différents éléments qui constituent l'être et l'univers.

Tattva Purusha (le Soi) et Tattva Prakriti (Pradhâna, le Prééatbli)
Avyatka-prakriti :
Non-manifesté
Buddhi (Mahat) : l'Intelligence

Vyatka-prakriti: Manifesté
Ahamkâra : la notion d'ego
Manas : le mental
5 karmendriya : facultés d'actions physiques
5 jnânendriya : facultés de perceptions sensorielles
5 tanmatra : éléments subtils
5 mahâ-bhûta : éléments grossiers

5 karmendriya
vâc : parole
pâni : préhension
pâda : déplacement
upastha : procréation
pâyu : excrétion
5 jnânendriya
sabdendriya : ouïe
sparsendryia : toucher
rûpendriya : vue
rasendriya : goût
gandhendriya : odorat
5 tanmatra
sabda : principe sonore
sparsa : principe tangible tactile
rûpa : principe visible
rasa : principe gustatif
gandha : principe olfactif
5 mahâ-bhûta
âkasha : principe d'espace
vâyu : principe du mouvement
tejas : principe de combustion
ap : principe de fluidité
prthvî : principe de masse
A partir de Pradhâna, apparaissent 7 principes qui sont à la fois produits et producteurs : Buddhiahamkâra et les 5 tanmatras. Les autres principes manifestés ne sont que produits.

Buddhi, ahamkâra et manas

Buddhi, l'Intelligence, est la forme la plus subtile de Prakriti et détermine la connaissance de l'objet et la connaissance de la nature du Purusha.
"L'Intelligence (Buddhi) c'est la détermination : vertu, connaissance, renoncement, souveraineté constituent sa forme la plus lumineuse ; il existe une forme ténébreuse à l'opposé de celle-ci." (S-K. 23)
Buddhi signifie éveil. C'est un état de grande lucidité où le guna sattva prédomine. L'Intelligence permet de faire la distinction entre la Matière (Pradhâna, Prakriti) etPurusha. Tout ce qui entre dans le champ de la conscience passe par Buddhi.
"De même que l'Intelligence (Buddhi) procure l'ensemble de la jouissance au Purusha, en vérité, elle établit aussi la différence subtile entre la Matière (Pradhâna) et le Purusha." (S-K. 37)
Même si Buddhi est la forme la plus subtile, sattvique de Prakriti, les guna rajas ettamas restent présents. Ainsi, comme le dit la strophe 23 des Sâmkhya-Kârikâ, si les autres guna prédominent dans Buddhi, alors ce sont le vice, l'ignorance, l'attachement et l'impuissance qui se manifeste. Si sattva domine, alors Buddhi va vers le positif, la connaissance (jnâna), le détachement (virâga), la vertu (dharma) et la souveraineté (aisvarya).
Ahamkâra, c'est la notion d'ego, l'individuation, qui donne la forme et qui fait le tri entre les informations reçues par les perceptions sensorielles. C'est ce qui construit notre ego à travers ce qui vient des perceptions et de la mémoire qui contient notre conditionnement. Manas, le mental, permet de recevoir les perceptions sensorielles et d'agir.
Buddhi, l'Intelligence, ahamkâra, l'ego et manas, le mental, constituent l'organe interne. Il fait le lien entre Purusha et l'extérieur. Si les différents éléments de l'organe interne ne respectent pas leur place hiérarchique respective, il y a alors confusion, erreur et souffrance. Il y a déséquilibre entre les différents éléments et ignorance.

Ignorance et délivrance

Pour le Sâmkhya, ce qui maintient Purusha enchaîné à Prakriti, c'est l'ignorance,avidyâ. Elle consiste à ne pas différencier ce qui relève du Purusha et ce qui relève de la Prakriti. L'ignorance, c'est avoir une conscience limitée des choses et prendre ce qui est impermanent pour ce qui est intemporel. La conscience est constamment sollicitée par les stimulis psychosensoriels et ne parvient donc pas à discerner la nature profonde de l'être.
L'ignorance vient du fait que les différents éléments de l'organe interne, Buddhi,ahamkâra et manas, sont en déséquilibres et ne respectent plus la hiérarchie de leur rôle, d'où confusion et conscience limitée. L'organe ne fonctionne plus correctement et ne peut plus faire correctement le lien entre Purusha et l'extérieur.
Le Sâmkhya passe au crible les différentes façons de percevoir les choses. Il expose les défaillances qu'on peut avoir dans la perception, la réception et l'analyse des informations.
"Les objets ne sont pas perçus du fait :

-d'une distance excessive;
-d'une proximité excessive;
-d'une infirmité des sens;
-de l'inattention
-de leur petitesse ou subtilité;
-d'être dissimulés;
-d'être relativisés;
-d'être mêlés à des objets semblables." (S-K. 7)

Ainsi, si le mental, manas, et l'ego, ahamkâra ne sont pas sous le contrôle de l'Intelligence, Buddhi, ils s'attribuent le rôle de synthèse de Buddhi. lls prennent le dessus et vont rechercher automatiquement ce qui est agréable et délaisser ce qui est désagréable. La vision est faussée et on voit ce qu'on veut voir. Ahamkâra, l'ego, en saississant les informations, détermine la forme de façon partielle et partiale. L'Intelligence, Buddhi, ne peut plus jouer son rôle de synthèse et devient de plus en plus voilée.
Pour atteindre la Délivrance, il est nécessaire de reconnaître le Purusha dans son essence. Pour le Sâmkhya, la libération consiste en kaivalyam, l'isolement-libérateur. Pour cela, il faut remettre en ordre le rôle des éléments de l'organe interne. Buddhi,ahamkâra et manas doivent retrouver leur place dans la hiérarchie et fonctionner correctement. L'usage de la discrimination permet de restituer les rôles. Ainsi, lorsqueBuddhi n'est plus parasité par des informations erronées fournies par ahamkâra, il lui est possible de réfléchir le Purusha. Une fois le Purusha reconnu, l'identification exclusive avec ahamkâra, l'ego et les perceptions sensorielles est rompue. La conscience sait ce qui est de l'ordre de Purusha et ce qui est de l'ordre de Prakriti.Prakriti ne joue plus son rôle hypnotique et il y a délivrance.
"La séparation d'avec le corps ayant été atteinte lors de l'arrêt de Matière (Prakriti), celle-ci ayant atteint son but, le Purusha obtient l'isolement-libérateur (kaivalyam) qui est à la fois nécessaire et infini" (S-K. 68)
L'obtention de la délivrance ne signifie pas l'arrêt de la vie immédiate, car l'être continue d'exister dans la matière.
"Lorsqu'il a atteint l'état où la vertu, etc. cessent d'opérer en raison de son obtention de la connaissance correcte, il reste pourvu d'un corps du fait de l'emprise des constructions psychiques résultant du passé, comme la roue du potier qui continue de tourner." (S-K. 67)
Il s'agit ici du jîvanmukta, le libéré-vivant, qui est libéré, c'est-à-dire qui a reconnuPurusha, mais qui continue d'exister dans la matière le temps que son corps finisse son parcours dû à l'impulsion donnée par les activités psychiques et physiques du passé. Une fois que le mouvement est fini, Purusha est définitivement libéré et n'est plus lié àPrakriti.


http://yogwa.over-blog.com/categorie-11573263.html



L'Ātman[modifier]


Le cygne symbolise deux choses en Advaita Vedānta : premièrement, en sanscrit, il est appelé haṃsa (avant un /h/ du mot suivant--« hamso »), et en répétant ce mot continuellement, il devient « so-aham », qui signifie « je suis cela ». Deuxièmement, il représente une personne libérée. Tout comme le cygne habite sur l'eau, mais ses plumes ne sont pas salies par l'eau, de même, une personne libérée habite dans ce monde de Māyā, mais n'est pas touchée par cette illusion.
Dans la philosophie de l'Advaita Vedānta le soi non individualisé (Ātman) que l'on confond parfois avec le concept d'âme est exactement égal à Brahman. Ce n'est pas une partie de Brahman qui se dissout finalement dans Brahman, mais le Brahman entier lui-même. Alors, les sceptiques demandent comment l'âme individuelle, laquelle est limitée et une dans chaque corps, peut être pareille à Brahman ? Shankara explique que l'âme n'est pas un concept individuel. L'Ātman est seulement un et unique. Le concept selon lequel il y a plusieurs ātman est faux. Shankara dit que tout comme la même lune apparaît comme multiple à travers ses reflets sur la surface d'une eau couverte de bulles, l'unique Âtman apparait comme de multiples ātman dans nos corps à cause de la Māyā. L'Ātman se prouve de lui-même, cependant, quelques preuves sont discutées. Par exemple, une personne dit « je suis aveugle », « je suis heureux », « je suis gros », etc. Donc quel est cet ego, ici ? Seulement cette chose est l'ego qui est là-bas dans tous les états de cette personne — cela prouve l'existence de l'Ātman, et aussi que la conscience est sa caractéristique. La réalité et la félicité sont aussi ses caractéristiques. Par sa nature, l'Ātman est libre et au-delà du péché et du mérite. Il n'éprouve ni le bonheur ni la douleur. Il ne produit pas de Karma. Il est incorporel.
Quand le reflet de l’Ātman tombe sur Avidyā (l'ignorance), l'Ātman devient jīva — un être vivant, avec un corps et des sens. Chaque jîva se sent comme s'il avait son propre Ātman, unique et distinct, appelé jīvātman, "âme individuelle". Le concept de jīva est vrai seulement au niveau pragmatique. Au niveau transcendantal, seul l'unique Ātman, égal à Brahman, est vrai.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Advaita_Ved%C4%81nta


La sensation perceptible ; beaucoup de gens, quand ils atteignent l'état de turīya, prétendent que leur âme est devenue un avec le Tout. La sensation de cette perception de transcendance est considérée comme la meilleure preuve de l'existence du Brahman.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Advaita_Ved%C4%81nta


Hindouisme[modifier]

Article détaillé : Advaita Vedānta.
Dans l'Hindouisme le Brahman, l'âme universelle, est pleinement identifié à l'Ātman, l'âme individuelle. Pour l'Advaïta, tout est une seule et même réalité, et les distinctions entre, individualité et âme universelle, entre objet et sujet résultent de l'ignorance de la vraie nature de l'univers et de la vie qui transcende le temps et l'espace. Dans cet état d'ignorance, l'individu resterait prisonnier des illusions du monde, la māyā, et n'échapperait pas aux réincarnations successives, fruit de sonkarma. C'est une conception similaire à celles du bouddhisme et du taoïsme.

En occident[modifier]

La non-dualité n'est pas absente des philosophies occidentales, mais il semble qu'elle ne fut pas aussi clairement énoncée, la non-dualité proclamant l'identité de l'homme et de Dieu, ce qui a pu être considéré blasphématoire par les églises dominantes. L'expérience mystique aboutissant naturellement à l'effacement de toutes les dualités, toutes les séparations, certains mystiques chrétiens ont exprimé cette non-dualité de façon assez claire : Jean de La Croix, et Maître Eckhart4. Leurs témoignages se rapprochent par exemple de ceux du moine zen Hakuin, évoquant l'esprit de non-naissance, ou encore de la description du quatrième état de conscience, turiya, de la tradition hindoue, ou l'expérience de disparition de l'ego. Chez les philosophes, seul Spinoza affirme clairement une position non dualiste en affirmant l'existence d'une seule substance infinie et éternelle à la fois Dieu et Nature, réalité unique qui n'est ni matière, ni pensée, mais pure joie d'être, position reprise par des philosophes contemporains comme Clément Rosset ou Bruno Giuliani.

Néo-Advaïta[modifier]

Un courant plus récent, généralement désigné sous le terme générique "non-dualité", mais correspondant plus précisément par ses racines à un Néo-Advaïta5 ou Néo-Védanta6 est apparu en Occident dans la seconde moitié du xxe siècle. . Ses promoteurs sont généralement des occidentaux qui ont été disciples de maîtres indiens et sont retournés dans leur pays pour exposer leur compréhension de ce système de philosophie (Jean KleinArnaud DesjardinsAndrew CohenEckhart Tolle


Connaissez-vous l'étymologie du mot "désir" ?

Du latin de- sideror :
De- : être intensément
Sideror : sous (l'influence d')une constellation d'étoiles

Le désir c'est de ne rien faire, hormis être intensément sous les astres. Laisser être, et écouter les bruits de la source tout au fond de nous, au présent. 

> Sur le principe énergétique "Candra" (lune), extrait du week-end de formation EPY du 16-17 mars 2012



[…] le Papalagui pense tant que penser lui est devenu une habitude, une nécessité et même une obligation. Il faut qu'il pense sans s'arrêter. Il parvient difficilement à ne pas penser, en laissant vivre son corps. Il ne vit souvent qu'avec la tête, pendant que tous ses sens reposent dans un sommeil profond, bien qu'il marche, parle, mange et rie.
Les pensées, qui sont les fruits du penser, le retiennent prisonnier. Il a une sorte d'ivresse de ses propres pensées. Quand le soleil brille, il pense aussitôt : « Qu'il fait beau maintenant ! » C'est faux. Fondamentalement faux. Fou. Parce qu'il vaut mieux ne pas penser du tout quand le soleil brille.
Un Samoan intelligent étend ses membres sous la chaude lumière et ne pense à rien. Il ne prend pas seulement le soleil avec la tête, mais aussi avec les mains, les pieds, les cuisses, le ventre et tous les membres. Il laisse sa peau et ses membres penser pour lui. Et ils pensent certainement aussi, même si c'est d'une autre façon que la tête. Mais pour le Papalagui l'habitude de penser est souvent sur le chemin comme un gros bloc de lave dont il ne peut se débarasser. Il pense à des choses gaies, mais n'en rit pas, à des choses tristes, mais n'en pleure pas. Il a faim, mais ne prend pas de taro ni de palousami. C'est un homme dont les sens vivent en conflit avec l'esprit, un homme divisé en deux parties.
Le Papalagui pp. 125-126

Le passé n’existe plus, l’avenir n’existe pas encore. Seul existe le présent. Dans Noces, au chapitre intitulé "le désert", Albert Camus note que les deux seules choses qui nous sont données sont le corps et le présent et que les refuser serait refuser de vivre.
Vivre l’instant présent, c’est alors être présent à soi et au réel. Nos esprits, en activité incessante entre nos impressions du passé et nos projets pour l’avenir, entre nos préjugés et nos appréhensions semblent   s’opposer à une telle possibilité. Dès lors, il ne s'agit pas de refuser la pensée du passé et du futur, puisqu'elle nous est essentielle pour penser et parler, mais de ne plus nous identifier entièrement à elle. Rien de l'existence humaine n'est refusé puisque tout a lieu dans le présent de la pensée ; la différence réside dans les conséquences que l'on tire de la perception des pensées.

Mais l’instant présent existe-t-il ? Le temps en philosophie est une entité psychologique. Le temps n'est que dans la mesure où il est présent. Le présent du passé, c'est la mémoire, le présent de l'avenir, c'est l'attente, le présent du présent, c'est la perception.

Nous avons un outil extraordinaire pour nous connecter au présent et permettre de lâcher le mental et ses stratégies.
C’est le corps humain. Le corps humain vit uniquement dans l’instant présent.
Ce qui est le but ultime du Yoga. Yoga : être relié.

Etre à l'unisson. Entendre ce son, passe par la perception. Ou la notion de lien comprise dans le sens également de ce qui unit ou mieux encore, ce qui réunit. Le yoga permet de relier les différentes parties de notre être, nous relier aux autres et au monde. Avec le yoga, nous permettons à notre tête, notre coeur, notre corps de fonctionner en unité, aux différentes parties de notre être de regarder dans la même direction.

Le yoga et la perception, ou comment avoir une vision plus claire et plus saine de la réalité.
Le yoga ou la perception, ou notre regard sur le monde.

I. Nirodha (contrôle) : Tout réside dans le fait de prendre le monde comme il est.
"La vie est toujours donnée de travers".

Il existe un espace en nous, non tourmenté. Ce qui est ne remet jamais en question l'être profond.
Cela se place au-delà de la dualité, du bien et du mal. Cela permet à un moment pouvoir être en paix.

"On a déjà moins peur de l'inconnu lorsqu'on le saisit dans le faisceau de sa lampe... "
Petite note sur les aphorismes II. 1 à 9 par Béatrice Viard

Nous trouvons dès lors plusieurs niveaux à la personne.
Nirodha ouvre à une perception.
La page blanche sur laquelle les évènements, les faits, les personnes peuvent venir marquer leur trace. Tout cela est, recevable.

Par rapport au temps, au travail ou tapas (L'ascèse ou ascétisme est une discipline volontaire du corps et de l'esprit cherchant à tendre vers une perfection, par une forme de renoncement ou d'abnégation), nous mettons des choses en oeuvre dans notre vie pour que devienne peut-être possible un état perceptible plus paisible.
Et la perception peut-elle exister sans la paix intérieure ?

"Au départ (...) dans le sens de "clarté de l'esprit", samâdhi suggère moins de lourdeur, moins de souci, moins d'obscurité, une attraction irrésistible qui déjà amène l'oisillon vers le bord."
Petite note sur les aphorismes II. 1 à 9 par Béatrice Viard

Lors d'une séance de yoga, nous allons à la rencontre des supports.
A partir de le yoga, la perception, quand cela se passe, cela se fait dans l'immédiateté, "cela te saute au visage", comme une évidence, un moment de clarté parfois même parce que l'on est parfaitement absorbé par autre chose.
Image de l'eau trouble, si j'attends, les choses se posent, l'écran disparaît, je vois.
Nous verrons dès lors s'il est nécessaire de rapprocher ou de différencier la perception de l'intuition, la perception du ressenti ?
Nous concevons de suite ce rapport intime de la perception avec le temps.

Nous comprenons que cette recherche nous aidera à aller vers quelque chose qui nous apaise, vers une action mentale réduite, vers un rythme qui devrait toujours être en adéquation avec la vie, avec notre musique intérieure, en harmonie.

YS II. 41 "La clarté de l'esprit au sens spirituel, un esprit positif, ne bonne capacité de concentration, la maîtrise des facultés de perception et d'action et l'aptitude à la vision de l'être profond."

YS II. 43 "Par la discipline qui détruit les impuretés advient la perfection du corps et des onze organes (cinq organes de sens, cinq organes d'action -dix indrya- et un manas -l'interface-)."

II. La perception rejoindra naturellement la grande question de la méditation.

1. La perception et le temps ou Voir, Drasttre, la clairvoyance ou d'un point de vue philosophique

La perception d'un point de vue philosophique est l'entendre, la vérité, la relation de la parole et de l'inconscient.
Chaque discipline a ses moyens.
Une perception du sujet particulière comme le temps de quelque chose qui se déplie.
La perception ultime s'inscrit dans une fulgurance de temps, en un éclair : un moment de révélation dans l'instant.
Pour le yoga, c'est l'immédiateté du voir.
Pour le yoga, la réponse est dans le présent, la recherche est vis-à-vis du présent ; 
"Voir ce qui est qui se présente", saisir le déroulement du temps, à la différence des épicuriens.
L'instant est dès lors vécu comme la résultante de toute une histoire, à la différence de l'hédonisme.

2. citta vritti, modification, conception de l'esprit, Niroda
  • « La phénoménologie (...) c'est d'abord le désaveu de la science. » (Phénoménologie de la perception, p. II). Il est primordial de noter que le terme « désaveu », lié à une question méthodologique dans le retour aux « choses elles-mêmes », n'a ici aucune connotation péjorative. Aussi Merleau-Ponty précise-t-il que « si nous voulons penser la science elle-même avec rigueur, en apprécier exactement le sens et la portée, il nous faut réveiller d'abord cette expérience du monde dont elle est l'expression seconde. » (Phénoménologie de la perception, p. III).
  • « Qu'il s'agisse des vestiges ou du corps d'autrui, la question est de savoir comment un objet dans l'espace peut devenir la trace parlante d'une existence, comment inversement une intention, une pensée, un projet peuvent se détacher du sujet personnel et devenir visibles hors de lui dans son corps, dans le milieu qu'il se construit. » (Phénoménologie de la perception, p. 401).
La phénoménologie de la perception selon Merleau-Ponty pose la question de la nature de la rencontre. Le sujet qui perçoit ou l'objet qui se donne à voir.

"L'ayant bien regardé, tout entier, elle lui donne la boussole, le sextant, la lunette, tout instrument nécessaire à la réussite de la traversée."
Petite note sur les aphorismes II. 1 à 9 par Béatrice Viard

"Que la cause de la souffrance soit l'identification (samyoga), oui (...). Cette union entre cela qui observe et cela qui s'offre à l'observation, il en avait déjà entendu parler (...). Elle ne disait ni "observateur" (drashtri) ni "objet d'observation" (drishya), mais elle disait "l'être et l'étant", "l'essence et l'existence", et parlaient aussi de cette relation belle et compliquée que chaque terme entretient avec l'autre, relation de service mutuel et d'effacement de soi-même. L'objet est indispensable à l'observateur ; sans lui il ne serait jamais possible de prendre conscience de soi, or la souffrance ne pourra se soumettre qu'à ce moment-là.
Il fallait remonter comme le saumon à sa source, remonter depuis ce qui caractérise la personnalité de l'extérieur (a-vishesha), à ce qui constituent le "je" pour arriver à "l'Etre" (purusha)."
Petite note sur les aphorismes II. 1 à 9 par Béatrice Viard

III. Du point de vue de la psychologie
Nous nous interrogerons sur le lien spontané dans notre esprit entre la perception et l'émotion, la perception et l'intuition et si cette question peut nous proposer intrinsèquement l'expérience du discernement.

L'émotion peut-elle être vécue comme un trouble ou donnerait-elle accès à la perception ?

Le point de vue de l'analyste selon la psychologie, en terme de discipline, c'est l'entendre ce qui en lui se passe au moment où il écoute son patient, la résonance.
L'émotion naît, semble-t-il de la capacité à pouvoir entendre, au sens de la parole qui se donne.
L'analyste est censé avoir fait une analyse donc est censé comprendre ce qui se passe et interprété l'émotion pure.

"Freud poursuivait en disant que tous les éducateurs n’ont pas nécessairement les capacités d’intuition innées d’Aichhorn. C’est pourquoi il leur faut une formation psychanalytique ; « Sinon, l’enfant, objet du travail [du psychanalyste], demeure pour [eux] une énigme impénétrable ». Freud faisait en l’occurrence écho à une remarque formulée par Johann Pestalozzi (Gross, 1963), qui écrivait que, « si la capacité innée d’intuition ou l’« amour » pour l’enfant sont l’essence même de l’éducation, tout est alors subordonné à la perspicacité intuitive de chaque maître. D’où l’importance de la méthode dans la formation de ceux qui ne sont pas naturellement doués sur le plan de l’intuition. » Bettelheim a mis ce conseil de Freud en pratique à l’École orthogénique, où sa contribution à l’éducation des enfants consistait à éduquer ceux qui étaient chargés de s’occuper d’eux (Bettelheim, 1974).
Nous pourrons également rapprocher cela de la sensibilité. Le plus exemple réside dans l'art, dans cette façon de vibrer aux choses qui redonne les couleurs de la vie."

Le yoga donne un peu de recul sur nos pratiques de vie.
En se rapprochant de l'intuition, le yoga comme forme de perception amène au-delà du visible, un peu grossier, vers l'audible, un peu fin pour aboutir à une perception fine que nous pourrions appeler "intuition".

Personnellement, j'ai toujours senti quelque chose d'autre derrière une personne. La phrase qui fait plaisir me sort de la bouche spontanément dès que je dis "bonjour" à une connaissance. Je me sens connectée aux autres et j'ai mis longtemps à me rendre compte puis à admettre que chaque personne ne fonctionnait pas de la même manière que moi.
En même temps, je ne me cache pas que cela est aussi une façon de se protéger, de tout de suite sentir l'état, l'humeur de l'autre, de chercher "où il est" me permet de m'adapter.
Ceci me vient sans doute de l'enfance et de mon adaptation aux changements d'humeur de ma maman.

Et la question tome à point nommé : Quelle est la part de citta vritti dans l'intuition ?
La question de la vérité sous-tend cela.
Est-ce que cela parle de l'autre ou est-ce que cela parle de moi ?
Est-ce que quelque chose est venu parce que j'ai laissé de l'espace ?

La question de la différence de chaque personne l'une par rapport à l'autre, des niveaux de perception propres à chacun est fascinante pour moi, d'une richesse absolue.
Comment telle personne pourra sentir et reconnaître telles compositions de tels mets, chacune des saveurs et des épices. 
Comment telle autre personne aura l'oreille absolue.
D'où vient cela. 

Le purusa, l'être humain, pourquoi serait-il là ?
Il a besoin de l'action et de l'émotion. Il vit de la matière pour lui donner des informations, puisqu'il ne vit que dans le chitta.
Le chitta vibre.

La méditation porte la question de l'être. Voir ce qui est porte la question des niveaux.
Les niveaux dans l'ordre du monde. Qu'est ce qui se joue ? Est-ce le don de l'espace ? Comment ça marche autour de nous. Comment nous posons-nous la question de voir le monde dans lequel on a été posé ?

Le yoga est tant que perception fine nous permet de voir finement, nous fait le don de la résonance avec l'intérieur de nous, dans ce travail de la méditation.
Il s'agit de la perception de couches : extérieur, énergétique, émotionnelle, de l'appétit profond de la personne.

YS I. 40 Le citta sort alors de ses enfermements et agrandit son champ de perception vers du plus grand ou vers du plus petit, vers le plus proche ou le plus lointain. 
Image de tout l'univers dans une goutte d'eau.
Si tu aimes un être humain, tu aimes l'humanité.
Ce que tu fais à ton niveau, la manière dont tu le fais, sert l'humanité.

Cela permet d'accepter les limites.

Nous pouvons prendre la posture comme perception de l'infini. On va toujours plus loin dans la perception. Les limites se défont et on en rencontre de nouvelles.
L'infini ne cesse de s'infinir...

Le purusa : le yoga nous dit que nous sommes un être de perception.

YS I. 41 La dispersion du citta ayant été neutralisée par la pratique de la grâce comme en un cristal très pur entre le saisisseur, ce qui permet la saisi et ce qui est saisi le citta comme un onguent permet la révélation.

Avec le samadhi, avec ou sans mot, il y a un perception indicible. L'absorption lumineuse permet la fusion avec le cosmos.

Et toi, toi tu vois chez l'autre si tu vois chez toi.
Le subtil, le vrai n'est pas le jugement.
La fin des fins de nous-même est plus que ce qu'il imaginait, composite.

YS I. 35 L'esthétique, les organes des sens, se nourrir du monde par la sensibilité et l'affiner, percevoir le monde en couches plus subtiles. On a tous cette fibre artistique. Par rapport au goût au odeurs, on entre en contact avec le monde, avec soi-même.

C'est cela le discernement.

"En les observant, il fallait mettre le discernement (viveka) en oeuvre, qui permet de les distinguer, ensuite d'aider chacun à retourner à sa vraie nature qui est pour l'un de se démettre (samyoga, l'union), pour l'autre d'accepter son immobilité et son silence (avidyâ, l'ignorance)." 
Petite note sur les aphorismes II. 1 à 9 par Béatrice Viard

Avidyâ ou prendre ce qui est regardé pour ce qui regarde.

Moi, allié à un être humain qui n'a qu'une seule qualité : une incroyable liberté et une extraordinaire capacité de perception.

Dans la méditation dite de « la plénitude », par exemple, le méditant se repose confortablement et silencieusement, centrant l'attention sur un objet ou un processus : « ... Glissant librement d'une perception à une autre... Aucune pensée, image ou sensation n'est considérée comme une intrusion. Le méditant, avec une attitude vide de tout effort, est invité à explorer l’ici et maintenant. En utilisant l’ouverture panoramique comme point d'ancrage... ce qui ramène le sujet constamment au présent, évitant l'analyse ou l'imagination cognitive concernant le contenu de la conscience, et augmentant tolérance et relaxation du nom secondaire de la pensée processus.  »9.

rapport d'étonnement

changer de point de vue

observation


Jean Klein : la lucidité silencieuse sans support[modifier]
Dans la spiritualité contemporaine, comme dans les enseignements de Krishnamurti ou Jean Klein, le terme de méditation désigne un état de lucidité silencieuse sans support, une vigilance où les constructions mentales sont absentes. Ils ont dessiné quelques directions de méditation :
  • « l'attention » : Cette investigation requiert une attention vide de toute attente, de toute anticipation ; en quelque sorte, une attention innocente. Ce matin nous sommes paisiblement assis. C'est une méditation sans sujet pour méditer, et sans objet sur quoi méditer. C'est notre tranquillité naturelle. 23 ;
  • « l'observation » : L'enseignement repose principalement sur la compréhension, il s'agit plutôt d'être compréhension. Comprendre est le résultat d'une juste observation. C'est une observation ouverte, sans jugement, sans comparaison ni interprétation ; nous ne pouvons l'objectiver. Nous ne pouvons la situer dans l'espace, parce qu'elle est hors du temps. Le temps est une création de la pensée, tandis que l'observation qui émane de la totalité du corps relève, elle, de l'intemporel. 24 ;
  • « Le temps » : La pensée est le temps, la pensée est une fonction. Le temps est une expression de l'intemporel. Le temps doit cesser pour que puisse vivre l'intemporel. Et quand la pensée a découvert ses limites, alors nous sommes ouverts à l'intemporel, au  présent éternel. 24 ;
  • « La liberté » : La liberté dont vous faites l'expérience en ces moments-là ne peut jamais être objectivée, ni définie. Vous ne pouvez jamais la formuler. La compréhension peut bien se situer dans votre tête, mais être la compréhension n'a plus rien à voir avec la tête ; c'est votre perception globale. 25 ;
Rudolf Steiner : la méditation comme science de l'esprit[modifier]
Dans d'autres enseignements modernes comme, par exemple, ceux de Rudolf Steiner, la vision de la méditation répond a un besoin intérieur inhérent à la nature humaine. En effet, la conscience de soi de l'être humain actuel a été gagnée au prix de la perte de la perception de notre nature spirituelle et de la nature spirituelle du monde. Les questions existentielles de l'être humain proviennent de la perte de cette perception. Leur résolution n'est complète que lorsque l'âme humaine est à nouveau abreuvée par le monde spirituel. Par la méditation basée sur la pensée, l'être humain peut rendre cette faculté, qui est la plus élevée qu'il possède, autonome et libérée du corps. C'est par la pensée que tout être humain peut à nouveau faire l'expérience objective du monde spirituel. Ce contact avec le monde spirituel s'en trouve métamorphosé car il est désormais conscient et libre, chose qui n'était pas possible dans le passé de l'humanité26.

Susan Blackmore défend par exemple, sur base de sa propre pratique du zen et de ses recherches scientifiques, que la conscience est une illusion.


Il nous arrive à tous de nous dire que nous vivons à la superficie de nous-mêmes, comme des auto-mates, conditionnés par l'idée préconçue de qui nous sommes. Au-delà des apparences, Thierry Janssen nous invite à découvrir ce qui constitue l'essence de notre humanité. Inspiré par la pensée de la Chine et de l'Inde, influencé par les acquis de la psychologie humaniste de l'Occident, il nous propose d'apprivoiser les différents " personnages " qui vivent en nous. Nous apprenons alors à laisser tomber nos masques pour transformer nos peurs et abandonner nos défenses.

Biographie de l'auteur
Thierry Janssen a quitté son métier de chirurgien pour se consacrer à l'étude des liens entre la spiritualité, la psychologie et la santé du corps. Devenu psychothérapeute, il accompagne des patients atteints de maladies physiques et il enseigne les principes d'une médecine humaniste aux professionnels de la santé. Il est notamment l'auteur de Vivre en paix, paru aux Éditions Marabout. 
Le travail d'une vie : Quand psychologie et spiritualité donnent un sens à notre existence [Poche]
Thierry Janssen (Auteur) 

Identifiés à notre " moi " rationnel, nous refoulons nos émotions et nos sensations physiques. C'est à ce prix que s'est développé notre intellect. Hélas, celui-ci régente souvent nos vies, en maître exigeant sachant mentir pour se préserver, au prix de conflits incessants avec nous-mêmes et autrui. Thierry Janssen nous invite à explorer le fonctionnement de notre esprit et à démonter les mécanismes de notre personnalité pour découvrir la vérité de notre âme. Retrouver l'intimité de soi dans l'instant, accepter le moment présent comme la seule réalité que nous puissions transformer, abandonner notre souffrance, choisir de pardonner à soi-même et aux autres : telles sont quelques-unes des voies que Thierry Janssen nous invite à parcourir pour trouver ensemble le chemin de la paix. Parce qu'il est temps pour l'humanité de devenir réellement humaine. Parce que rien ne changera si nous ne commençons pas par nous-mêmes.

Biographie de l'auteur
THIERRY JANSSEN a abandonné son métier de chirurgien pour se consacrer à l'étude des liens entre la spiritualité, la psychologie et la santé du corps. Formé aux Etats-Unis à la médecine énergétique et aux approches psycho-corporelles, il accompagne ceux qui souhaitent s'éveiller à la réalité de leur âme. 

Vivre en paix - Trouver la paix en soi pour inventer la paix avec les autres [Broché]
Thierry Janssen (Auteur)

posture, voute plantaire, perception subtile


Elle donne à «trouver Dieu en toutes choses», selon la belle formule d’Ignace, c’est à dire à reconnaître que c’est dans notre existence humaine que Dieu nous parle et qu’il nous faut le trouver. Toute notre vie, toutes nos occupations, sont ainsi une occasion de rencontrer Dieu. Elle donne aussi à entrer en relation avec les autres, de façon bienveillante, à partir des circonstances de leur vie, de leurs préoccupations, de leurs joies ou peines.
Cette écoute de l’homme, qui pousse chacun à œuvrer dans et pour le monde, est un trait typiquement ignatien.
Elle nécessite d’être, en retour, à l’écoute de ce qui nous agite, nous comble ou nous détruit. Discerner, «sentir en soi» comme le dit Ignace, les mouvements de notre âme est aussi une façon d’entrer en relation avec celui qui nous comble. Cette façon d’être, de communier peu à peu avec son être profond et celui qui nous a crée apaise, convertit les émotions, fait taire peu à peu l’anxiété, éduque à la vie spirituelle. Cela ouvre au monde, donne de le regarder avec justesse, sans naïveté ni désolation. Et cela permet, enfin, de faire les choix qui conviennent et de découvrir, en toute liberté, ce qui est bon pour soi et ce que Dieu veut pour nous.

Souvent, dans nos vies, c’est l’épreuve de l’urgence à laquelle il faut consentir. Alors le discernement se joue davantage dans la manière d’accueillir ce qui vient, de se situer face à la complexité de nos situations.

Et la joie et la paix nous sont donnés en retour.

Perception et discernement

Le discernement est la faculté de reconnaître distinctement en faisant un effort des sens (vue, ouïe,...) ou de l'esprit, ou de tous ces éléments conjugués.
Le discernement peut en première approche se rapprocher de l'intuition. Cependant, l'intuition, qui est une prise de conscience immédiate et individuelle, peut conduire à des erreurs d'appréciation.
Descartes affirmait qu' « il n’y a pas d’autres voies qui s’offrent aux hommes, pour arriver à une connaissance certaine de la vérité, que l’intuition évidente et la déduction nécessaire » (XII° règle).



le Papalagui étouffe son corps avec des peaux lourdes et serrées qui le privent de soleil, le Papalagui vit dans des coffres de pierre empilés, séparés par des fentes bruyantes et grises , le Papalagui est obsédé par le métal rond et le papier lourd qui régissent toute sa vie; le Papalagui a inventé un objet qui compte le temps; depuis il court sans cesse derrière... Le Papalagui a développé bien d'autres maladies et comportements absurdes... 

Tout est tellement clair et bien dit, c’est un réquisitoire sans appel contre l’enfermement dont notre désir de tout maîtriser nous rend coupables envers nous-même. Ou dont le mental se rend coupable envers l’Esprit. Touiavii a écrit à ce propos d’autres pages d’une limpidité impitoyable. 

      TEMPS

      «Quand le mot esprit vient dans la bouche du Papalagui, ses yeux s’agrandissent, s’arrondissent et deviennent fixes, il soulève sa poitrine, respire profondément et se dresse comme un guerrier qui a battu son ennemi, car l’esprit est quelque chose dont il est particulièrement fier. Il n’est pas question là du grand et puissant Esprit que le missionnaire appelle Dieu, et dont nous ne sommes qu’une image chétive, mais du petit esprit qui est au service de l’homme et produit ses pensées.

      Quand d’ici je regarde le manguier derrière l’église de la mission, ce n’est pas de l’esprit, parce que je ne fais que regarder. Mais dès que je me rends compte que le manguier dépasse l’église, c’est de l’esprit. Donc il ne faut pas seulement regarder, mais aussi réfléchir sur ce que l’on voit. Ce savoir, le Papalagui l’applique du lever au coucher du soleil. Son esprit est toujours comme un tube à feu chargé ou comme une canne à pêche prête au lancer. Il a de la compassion pour nous, peuple des nombreuses îles, qui ne pratiquons pas ce savoir-réfléchir-sur-tout. D’après lui, nous serions pauvres d’esprit et bêtes comme les animaux des contrées désertiques. 



    «C’est une chose embrouillée que je n’ai jamais vraiment complètement comprise, parce que cela m’ennuie de réfléchir plus longtemps que nécessaire à ces choses aussi puériles. Mais c’est une connaissance très importante pour le Papalagui. Les hommes, les femmes et même les enfants qui tiennent à peine sur les jambes, portent dans le pagne une petite machine plate et ronde sur laquelle ils peuvent lire le temps. Soit elle est attachée à une grosse chaîne métallique et pend autour du cou, soit elle est serrée autour du poignet avec une bande de cuir. Cette lecture du temps n’est pas facile. On y exerce les enfants en leur tenant la machine près de l’oreille pour leur faire plaisir.

    Ces machines, que l’on porte facilement sur le plat de deux doigts, ressemblent dans leur ventre aux machines qui sont dans les ventre des bateaux, que vous connaissez tous. Mais il y a aussi de grandes et lourdes machines à temps à l’intérieur des huttes, ou sur les plus hautes façades pour qu’on puisse les voir de loin. Et quand une tranche de temps est passée, de petits doigts le montrent sur la face externe de la machine et en même temps elle se met à crier, un esprit cogne contre le fer dans son coeur. Oui, un puissant grondement s’élève dans une ville européenne quand une tranche de temps s’est écoulée.

    Quand ce bruit du temps retentit, le Papalagui se plaint: Oh! là! là! encore une heure de passée!”Et il fait le plus souvent une triste figure, comme un homme portant un lourd chagrin, alors qu’aussitôt une heure toute fraîche s’approche. Je n’ai jamais compris cela, si ce n’est en supposant qu’il s’agit d’une grave maladie. Le Papalagui se plaint de cette façon: ”Le temps me manque!... Le temps galope comme un cheval!... Laissez-moi encore un peu de temps!...”

    (...)

    En Europe, il n’y a que peu de gens qui ont véritablement le temps. Peut-être pas du tout. C’est pourquoi ils courent presque tous, traversant la vie comme une flèche. Presque tous regardent le sol en marchant et balancent haut les bras pour avancer le plus vite possible. Quand on les arrête, ils s’écrient de mauvaise humeur: ”Pourquoi faut-il que tu me déranges? Je n’ai pas le temps, et toi, regarde comme tu perds le tien!” Ils se comportent comme si celui qui va vite était plus digne et plus brave que celui qui va lentement.

    Le Papalagui oriente toue son énergie et toutes ses pensées vers cette question: comment rendre le temps le plus dense possible? Il utilise l’eau, le feu, l’orage et les éclairs du ciel pour retenir le temps. Il met des roues de fer sous ses pieds et donne des ailes à ses paroles, pour avoir plus de temps. Et dans quel but tous ces grands efforts?

    Que fait le Papalagui avec son temps? Je n’ai jamais découvert la vérité, bien qu’il parle sans cesse et gesticule comme si le Grand-Esprit l’avait invité à un fono. Je crois que le temps lui échappe comme un serpent dans une main mouillée, justement parce qu’il le retient trop. Il ne le laisse pas venir à lui. Il le poursuit toujours, les mains tendues, sans lui accorder jamais la détente nécessaire pour s’étendre au soleil. Le temps doit toujours être très près, en traint de parler ou de lui chanter un air. Mais le temps est calme et paisible, il aime le repos et il aime s’étendre de tout son long sur la natte. Le Papalagui n’a pas reconnu le temps, il ne le comprend pas et c’est pour cela qu’il le maltraite avec ses coutumes de barbare.

    Mes chers frères, nous ne nous sommes jamais plaints du temps, nous l’avons aimé comme il venait, nous n’avons jamais couru après lui, nous n’avons jamais voulu le trancher ni l’épaissir. Jamais il ne devint pour nous une charge ni une contrainte.

    Que s’avance celui d’entre nous qui n’a pas le temps! Chacun de nous a le temps en abondance, et en est content; nous n’avons pas besoin de plus de temps que nous en avons, et nous en avons assez. Nous savons que nous parvenons toujours assez tôt à notre destination, et que le Grand-Esprit nous appelle quand il veut, même si nous ne connaissons pas le nombre de nos lunes.

    Nous devons libérer de sa folie ce pauvre Papalagui perdu, nous devons l’aider à retrouver son temps. Il faut mettre en pièces pour lui sa petite machine à temps ronde, et lui annoncer que du lever au coucher du soleil, il y a plus de temps que l’homme en aura jamais besoin.»


    Erich Scheurmann, Le Papalagui, Présence Images éditions, 2001, pour la trad française, coll. Pocket, pp. 66-70.

"Le Papalagui habite comme les fruits de mer dans une coquille dure[...]Sa hutte ressemble à un coffre débout". 
"Chaque Papalagui a une profession.Il est difficile de dire de quoi il s'agit. C'est quelque chose qui devrait être fait avec plaisir, mais que la plupart du temps, le Papalagui n'a pas l'envie de faire."
"[...]Le corps du Papalagui est de la tête aux pieds enveloppé de pagnes, de nattes et de peaux, si serrés et si épais qu'aucun oeil humain, aucun rayon de soleil ne les traverse, si serrés que son corps devient pâle, blanc et fatigué comme les fleurs qui poussent au fond de la forêt vierge."





DIMANCHE 8 JANVIER 2012

Debout sur les Epaules de Darwin - Baobab-Café

Pour Illustrer les discutions du BAOBAB-Café du 01 décembre sur le décor, j’aimerais partager l’expérience de cette émission qui a eu l’audace de me cueillir au réveil :



Mabuse (1478-1532), Saint Luc Peingnant la Vierge,
1515, Musée de Prague



D’abord, je me suis dis que l’exposé sur l’explication des phénomènes naturels dans l’antiquité par la cosmologie en comparaison avec leur explication scientifique aujourd’hui répondait parfaitement au débat que nous avons eu sur le changement dePerception du monde qui nous entoure, et donc sur le changement de vocabulaire du décor dans la narration de ce paradigme. 


J’ai vu une deuxième raison d’en parler ici. Elle se rapporte à la perception que nous avons du monde à travers l’expérience et les souvenirs. En effet, Jean Claude Ameisen explique que notre perception est composée, puis recomposée à l’occasion de chaqueVisualisation de nos souvenirs. En d’autres termes, nous reconstruisons notre carte mentale à chaque fois que nous la lisons. Et pour cela, nous pouvons relire dix fois le même livre en se disant à chaque fois qu’il est nouveau,  en y découvrant de nouveaux sens et de nouveaux détails. C’est à dire que la narration que nous nous faisons de notre propre vie, des espaces que nous traversons et du temps qui passe n’est en fait qu’un amalgame disparate de souvenirs en perpétuels rénovation.  

Quelque part, nous pouvons voir ici une incitation à produire une architecture qui résonne avec les Parcours Narratifs que nous nous sommes construits. Constructions individuelles mais qui se transforme au final en constructions collectives. (L’expérience étant d’abord une expérience individuelle que nous “élagons“ suivant des schémas partagés, comme le language.)

Mais alors quelle serait cette fameuse architecture qui rentrerait en résonance avec nos souvenirs et notre sensibilité ? Une dimension évoquée dans le BAOBAB-Café serait-celle de l’émotion. Nous trouverions alors dans le décor, qu’il soit figuratif, narratif, abstrait, amusant, symbolique, spirituel, voir même parfois immatériel, à travers l’ Emotion, un chemin formidable pour relier notre narration intérieur et le discours incertains du monde qui nous entoure.

Cette clef, l’émotion, pourrait revêtir un rôle fondamentale dans laCompréhension du message des hommes de toutes les époques. Et expliquer la présence si exitante de tant de courant architecturaux, artistiques et plastiques dans la tentative vaine d’exprimer ce que nous sommes.

La troisième et dernière raison, vient d’une réflexion personnelle qui a été réveillée, justement, en cette bonne grasse matinée. C’est celle de s’imposer de prendre le temps pour profiter de la vie en sachant que la multiplicité des choses que nous faisons ne compte pas autant que leur qualité, et la richesse que nous apporte leur souvenir évoqué.


Vincent Milla

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